A l’occasion de la commémoration samedi 1er juin, du 14è anniversaire du double assassinat des défenseurs des droits de l’homme Floribert Chebeya et Fidèle Bazana, la veuve, les enfants Chebeya, la Voix de Sans Voix (VSV) ainsi que le collectif des avocats, ont demandé l’ouverture d’un nouveau procès afin que les présumés commanditaires, le général John Numbi et Joseph Kabila, soient entendus.
La cérémonie de cette commémoration s’est déroulée en présence de la veuve et des enfants Chebeya ainsi que de la famille Bazana, sur deux différents sites à savoir, le village Kindobo dans la commune de la N’sele où l’assistance et quelques autorités ont découvert le mausolée érigé en faveur de ces défenseurs des droits de l’homme et la Paroisse Notre Dame de Fatima dans la commune de la Gombe, où le film « Assassinat de Floribert Chebeya : un crime d’Etat », suivi d’une conférence de presse animée par le collectif des avocats ainsi que d’une messe d’actions de grâce.
Bien que le mausolée compte désormais deux cercueils, un vide subsiste pour celui de Fidèle Bazana, dont le corps n’a jamais été retrouvé en 14 ans. Les parties civiles et leurs avocats réclament ainsi une analyse du sol de la parcelle du Général Zelwa Katanga, ancien chef de la police militaire, estimant qu’il pourrait renfermer des éléments sur la disparition du corps, en se fondant sur différents témoignages recueillis lors du précédent procès de 2021.
En dehors du procès, les deux familles biologiques des disparus ont également exigé à l’Etat congolais, la restitution du corps de Fidèle Bazana ainsi que la décoration de Chebeya, en le reconnaissant comme martyr de la démocratie. Ils estiment que ce mausolée où repose désormais le corps de Chebeya érigé derrière le mausolée de feu Étienne Tshisekedi, puisse servir de lieu de pèlerinage et touristique des activistes des droits de l’homme et des autres visiteurs.
Des ONG de défense es droits de l’homme lèvent le ton
Dans une déclaration commune, l’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits humains (partenariat de la Fédération internationale pour les droits humains – FIDH et de l’Organisation mondiale contre la torture – OMCT), l’Association africaine des droits de l’Homme (Asadho), le Groupe Lotus, la Ligue des électeurs et la Voix des sans-voix (VSV) se sont joint à cette initiative pour appeler à l’ouverture du procès du Général Djadjidja et du Général Numbi, ce dernier étant considéré comme le commanditaire principal de l’assassinat de Floribert Chebeya et Fidèle Bazana. D’autres policiers sont également en attente de jugement.
Toutes ces Ong de défense des droits de l’homme se joignent également aux avocats des familles Chebeya et Bazana, pour demander aux autorités congolaises, de disjoindre les poursuites contre les militaires et policiers inculpés dans cette affaire, afin que ceux qui sont déjà en détention préventive puissent être jugés en l’absence du Général Numbi sur le territoire congolais.
Un second procès doit donc être ouvert pour que les familles puissent poursuivre leur quête de justice et de vérité.
En outre, ces organisations se font également écho de la demande adressée au Président de la République Félix-Antoine Tshisekedi, en vue d’obtenir la révocation des forces armées, du Général John Numbi. Celui-ci doit pouvoir, s’il est appréhendé, être poursuivi et comparaître devant les juridictions congolaises compétentes. En effet, à date, le Général Numbi a quatre étoiles et aucun magistrat de la Haute cour militaire n’a un grade supérieur ou égal au sien, et ne peut donc le juger.
Lors de son arrestation, un lot important d’armes avait été retrouvé dans le véhicule que conduisait le Colonel Daniel Mukalay. Lors de son interrogatoire, il indiquera que ces armes lui avaient été données par le Général John Numbi. Le Colonel Daniel Mukalay a été condamné en 2015 à 15 ans de prison à l’issue de son procès devant la Haute cour militaire.
Le déroulé d’un procès dans ce dossier est également une priorité. Le Colonel Daniel Mukalay, détenu depuis 2010, purgeant actuellement sa dernière année de prison pour ce double assassinat, la tenue d’un nouveau procès permettrait de poursuivre la procédure de lutte contre l’impunité de l’ensemble des crimes commis dans cette affaire.
A savoir
Retraçant les différentes péripéties du procès Chebeya, le collectif des avocats a rappelé que le verdict était tombé mercredi 11 mai 2022 à la Haute Cour militaire de Kinshasa. Au cours de ce procès au second degré, l’ancien commandant du bataillon Simba de la police nationale et commissaire supérieur, Christian Ngoy Kenga Kenga avait été condamné à la peine de mort pour assassinat et désertion ; tandis que le policier Jacques Mugabo, reconnu comme étant l’un des exécutants, avait écopé de 12 ans de prison avec des circonstances atténuantes pour assassinat et Paul Mwilambwe qui avait détaillé le film de ce double crime devant les juges, avait bénéficié d’un acquittement.
Malgré ce verdict, la veuve Chebeya, la famille ainsi que les défenseurs des droits de l’homme, insistent sur la comparution du général John Numbi et de l’ancien président de la république, Joseph Kabila. Comme pour dire que, la quête de justice et de vérité se poursuit, dans l’espoir que la lumière soit faite sur ces atrocités et que les responsables rendent des comptes.
José Wakadila