L’ouvrage « Franck NGYKE KANGUNDU : le Destin tragique d’un chevalier de la liberté », écrit par la journaliste Grâce Ngyke, a été porté sur les fonds baptismaux, le mardi 5 novembre, à la bibliothèque Wallonie Bruxelles de Kinshasa.
Dans cet ouvrage, la journaliste Grâce Ngyke, fille biologique du journaliste Franck NGYKE, retrace les derniers jours de son père brutalement assassiné avec son épouse Hélène Mpaka, la nuit du 2 au 3 novembre 2005 à Kinshasa, devant leurs enfants.
Dans son allocution, l’auteure a fait savoir que ce livre a été écrit sous trois dimensions. Premièrement, pour purger « notre » conscience ; deuxièmement, ce livre a été adressé au gouvernement congolais actuel ; troisièmement, ce livre est un plaidoyer pour la mémoire de tous les journalistes assassinés. À l’en croire, c’est à partir de Franck Ngyke et Hélène Mpaka qu’on pourra parler de la reconnaissance nationale de tous les journalistes assassinés.
« Nous avons écrit cet ouvrage pour immortaliser notre père, pour que son histoire ne reste pas dans l’oubli. On a voulu faire entendre notre voix partout dans le monde à travers cet ouvrage », a déclaré la journaliste Grâce Ngyke.
Et d’ajouter : « Mon père suppliait à ses assassins de tout prendre et de lui laisser la vie. Quand ces derniers menaçaient d’entrer dans la maison pour nous achever aussi, il leur a dit : ‘Là, vous n’allez pas toucher à mes enfants, tuez-moi, mais ne touchez pas à mes enfants.’ C’est cette phrase qui a toujours motivé mon esprit à honorer un jour mon père, parce qu’il nous avait sauvés. C’est cette phrase qui nous avait sauvés. S’il avait été paniqué, les assassins allaient aussi nous tuer. »
Par ailleurs, la journaliste Grâce Ngyke a lancé une fois de plus un cri d’alarme à l’endroit des autorités du pays pour la reconnaissance de tous les journalistes assassinés.
« A travers ce livre, je n’arrêterai pas d’interpeller le chef de l’État Félix Tshisekedi pour qu’il entende les cris de cœur des orphelins qui continuent à souffrir en silence. Il y a un plaidoyer devant lui. Il dit qu’il est en train de prôner l’État de droit et nous croyons en ça. Ce qui a motivé mon combat, c’est que le chef de l’État, lors de la célébration de la journée mondiale de la presse en 2023, a martelé sur l’impunité des crimes commis contre les journalistes. Le ministre de la communication a une lourde charge parce qu’il fut journaliste et il doit honorer la mémoire de ses confrères« , a-t-elle déclaré.
Elle a, en outre, appelé à la création d’une maison des journalistes pour honorer leurs mémoires.
« Ce combat est une affaire de tous les journalistes. Créez une maison des journalistes où vous placerez les figures de tous les journalistes assassinés injustement et chaque année, au lieu d’honorer la mémoire des journalistes étrangers assassinés, nous allons honorer la mémoire de nos propres confrères. Dans le plaidoyer, nous n’avons pas demandé de millions, nous avons juste demandé la reconnaissance de tous ces journalistes assassinés. Et la construction d’une stèle, un monument où tous les journalistes pourront commencer à honorer la mémoire de leurs confrères assassinés brutalement. Nous avons aussi demandé réparation, car non seulement nous, les enfants de Ngyke et Hélène, mais tous les enfants sont malades de voir leurs parents partir sans explication, sans raison », a affirmé Grâce Ngyke.
De son côté, l’éditeur du journal La Référence Plus, André Ipakala, ancien employeur du journaliste Franck Ngyke, a déclaré qu’après son assassinat, il y a eu un procès inique et que la vérité n’a jamais été établie.
« On ne peut pas imaginer une plume qu’on fait taire dans un pays comme la République Démocratique du Congo, où nous plaçons la liberté d’expression en première position », a-t-il affirmé.
Il a invité les organisations internationales et les journalistes à défendre réellement les libertés fondamentales.
« Si nous nous mobilisons, nous pourrons y parvenir. Déjà, ce récit écrit par la fille de Franck Ngyke, notre fille, va nous permettre d’avancer dans la recherche de la vérité », a déclaré l’éditeur du journal La Référence Plus.
Pour rappel, dans ce récit de 182 pages, l’auteure relate avec douleur et beaucoup d’émotion la scène tragique de l’exécution de ses parents et les conséquences dévastatrices sur sa propre vie et celle de ses frères et sœurs, laissés orphelins du jour au lendemain, apeurés et émotionnellement très affectés.
Dans une sorte d’introspection, elle s’interroge sur les mobiles de cet acte de cruauté qui a définitivement transformé leur existence en un enfer sans fin, dont les conséquences dramatiques perdurent jusqu’à ce jour, dénués de tout soutien du gouvernement congolais.
Eldad Bwetu